Guillaume Boivin, le battant

Guillaume Boivin
Guillaume Boivin  Photo :  Pasquale Stalteri

« Allez, allez, let’s go! On lâche pas, on s’accroche! »

Pierre-Étienne Boivin se retourne : « C’est pas facile, il serre les dents… »

Un texte de Pierre Shanks

Pierre-Étienne est le frère de Guillaume Boivin, le dossard 201 de SpiderTech-C10, et son meilleur ami dans la vie. Il a couru la dernière saison en France comme amateur, mais a décroché cette année afin de se concentrer sur ses études. Guillaume vient de passer devant nous en queue de peloton, sur Camilien-Houde, dans la quatrième montée du Grand Prix de Montréal. Il en reste… 13.

Le tour suivant, Guillaume est aux avant-postes du peloton. Il avait entendu son frère et se souvient exactement où il se situe.

« Il m’a regardé, il a fait ouf! Ça dit qu’il a survécu à la dernière montée, il est soulagé, là, il a décompressé. »

***

Guillaume Boivin revient de loin. Il a raté une saison à peu près complète, l’an passé, en raison de graves problèmes de biomécanique. Huit mois sans pédaler, à travailler quotidiennement avec des spécialistes, huit mois à se remettre en question. Suis-je un autre de ces jeunes dont le potentiel ne se développera pas parce que le corps ne suit pas?

« C’est mentalement que ç’a été le plus difficile, avoue-t-il. Il y a toutes sortes d’idées qui te passent par la tête. Pourrai-je encore faire du vélo? Heureusement, j’ai eu le soutien de ma copine et de mes parents pour me remonter le moral. » De son équipe aussi bien sûr et de Pierre-Étienne, mais celui-ci était en France.

« Les mois de mars, avril et mai ont été les plus difficiles. Je voyais des coureurs qui faisaient des courses que je rêvais de faire, moi j’étais chez nous. Le temps est maussade à l’extérieur, tu es tout seul, tes amis sont tous partis parce que veut, veut pas, pratiquement tous tes amis font partie du vélo… (pause)… pas facile. Cette période-là, j’ai dû me faire une routine pour pas perdre le focus, pour pas abandonner. »

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Guillaume Boivin

Guillaume Boivin (Photo: Marcus)

Voilà pour la force mentale. Tu traverses ça, tu peux affronter n’importe quel peloton. Évidemment, le GP de Montréal n’est pas un parcours idéal pour un coureur comme lui, qui lorgne les classiques flandriennes et autres Paris-Roubaix. Guillaume grimpe Camilien-Houde en environ 4 minutes. Tu cherches donc ton air assez rapidement dans un peloton qui passe la bosse en 3 min 20 s.

Il y a aussi le début de course, souvent éreintant. « La plupart des coureurs vont te le dire, la première heure de course, c’est l’heure de course la plus difficile de toute la course! Même souvent bien plus difficile que la dernière heure de course. Tout le monde veut être dans l’échappée. Quand c’est parti, parfois, ça n’arrête pas!

« Ça me fait rire parce que tu écoutes les résumés de course à la télé et ça dit l’échappée est partie comme à tous les jours après 40 km, mais tu sais, c’est 40 km, comme… à bloc, là, complètement à bloc! C’est vraiment, vraiment difficile, mais c’est pas mentionné…

« Ici, si j’étais dans une autre équipe, ou pas un gars de la place, je serais pas au départ de la course parce que c’est pas mon type de course. Donc, j’apprécie l’expérience pleinement. »

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Guillaume Boivin

Guillaume Boivin (photo: Marcus)

Guillaume a fait honneur à son frère dimanche, et à l’équipe SpiderTech, en animant la course à trois tours de la fin. On a pu le voir, bouche ouverte, tirer le peloton et se vider pour son coéquipier François Parisien.

« Après la performance de François vendredi (10e au GP de Québec), j’ai tout donné pour lui. J’ai placé les gars à quatre tours de la fin. J’ai essayé de les protéger du vent. Avec trois tours à faire, j’ai parlé à mon coéquipier Lucas (Euser), je lui ai dit let’s go, là, on est chez nous, on fait un show, moi je vais vous amener au pied de la bosse.

« On a essayé de faire un bon show pour tout le monde qui nous a encouragés toute la fin de semaine. C’est ça que j’ai fait. »

Après son effort, Guillaume a explosé, bien entendu. Éjecté par le peloton, comme il se doit dans de telles circonstances. Dans les gradins, certains ont pensé qu’il poserait peut-être pied.

Mais non… « Pour tous les “Let’s go Guillaume!” que j’ai entendus pendant la journée, j’ai décidé de finir. »

Nous étions avenue du Parc, après la ligne d’arrivée, à la voiture de SpiderTech, au milieu de ses coéquipiers et des mécanos. Pierre-Étienne est arrivé, le visage rayonnant. Guillaume a souri.

Son meilleur chum était là, à ses côtés.

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