
Au bout du fil, Jules Burnotte est fébrile. Totalement. La course éreintante qu’il a disputée plus tôt ne lui donne même pas encore sommeil et on est en fin de soirée à son heure.
Après nous avoir raconté l’incident de course avec le Russe Alexandr Loginov (voir le texte sur la page Facebook de Skiplus), Jules a abordé quelques points plus en profondeur.
Amateurs, observateurs, journalistes constatent ces jours-ci que l’équipe masculine canadienne de biathlon vit ses moments les plus grisants depuis, depuis… toujours? Chose certaine, le biathlon canadien n’a pas rayonné autant aux JO depuis les médailles olympiques de Myriam Bédard en 1992 et 1994.
Ce n’est pas un hasard cependant si toutes les pièces tombent au bon moment. Jules, un universitaire qui sait articuler ses points de vue, a soulevé quelques points fondamentaux qui nous permettent de comprendre l’incroyable synergie qui règne au sein de l’équipe.

La préparation
Il y a en outre la préparation de l’entraîneur-chef Justin Wadsworth. La station de Zhangjiakou est à près de 1700 mètres d’altitude. “Notre dernière Coupe du monde avant les Jeux (Antholz) était à 1700 m, ça aussi ç’a aidé, de dire Jules. Justin a vraiment bien planifié les choses avant les Jeux.
“En fait, depuis Noël, nous avons toujours été à plus de 1700 m, à l’exception d’une semaine.”

Le tir
“Pavel (Lantsov, l’entraîneur du tir) nous fait faire les bonnes affaires. Il a vraiment réussi à hausser le niveau de tir de toute l’équipe. J’ai pu travailler avec lui et le travail de la dernière semaine a fait une différence.”
Jules n’est pas le seul à parler ainsi. Ses coéquipiers ainsi qu’Emma Lunder ont tous affirmé que le travail de l’été dernier, notamment sur l’exécution et la rapidité du tir, rapportait ses fruits cette saison.

Les skis
“On ne peut pas passer sous silence la qualité des skis que nous avons en dessous des pieds”, lance Jules.
L’équipe technique dirigée par Raphaël Grosset, dit RAFI, compte notamment sur Andrew Chisholm, un passionné, un génie, un fou de la structure! L’excellent analyste Roddy Ward, ancien Directeur haute performance de Biathlon Canada et entraîneur-chef de l’équipe féminine (il était aux JO de 2018), a révélé sur les ondes de CBC que Chisholm “tested 50 different grinds on the skis to find the perfect one”. Il a réalisé 50 tests avant de trouver la structure idéale pour les Jeux de Beijing.
“Le “grind” (nous n’y connaissons rien!), c’est la structure de la base du ski, résume Jules. Ça peut être très dur à voir à l’oeil nu. Ça se fait avec une pierre ou une petite lame qui donne une texture au ski. Et ça, ça change quelque chose dans nos résultats!”
L’équipe technique de RAFI est composée, en plus de lui-même et Andrew Chisholm, de Paul Moore, Félix Bérubé-Larochelle et Charles Pépin, ces deux-ci étant des amis de longue date de Jules. “On faisait des Coupes Québec ensemble, dit Jules. C’est vraiment formidable qu’ils puissent être ici et qu’on vive les Jeux tous les trois ensemble.”

Rapidité et pic de forme
Avant même de terminer notre question concernant sa rapidité, Jules interrompt: “Louis doit être content!” Louis, c’est Louis Bouchard, l’entraîneur-chef du CNEPH, où Jules est devenu membre il y a deux étés. Le premier athlète du CNEPH autre que skieur(euse) de fond.
Aux Jeux, Jules est presque systématiquement le plus rapide de l’équipe. “Le parcours y est pour beaucoup, précise-t-il. Je suis grand et je suis lourd, alors les longues montées, c’est plus dur pour moi.
“Ici il y a une longue montée, mais graduelle, et quelques montées abruptes mais courtes. Je ne sais pas trop comment dire, mais on dirait que je suis plus musculaire que cardio. Je suis aussi capable sur ce parcours-là de garder ma vitesse dans les virages.”
Jules a eu des ennuis médicaux qui sont finalement derrière lui. Le dernier été, absent de toute séquelle de ses commotions cérébrales et autres séquelles reliées vraisemblablement à la COVID, fut le premier véritable entraînement estival intensif de sa carrière entièrement consacré au biathlon. Le tir demeure un défi car il n’y a pas de champ de tir au mont Sainte-Anne.
Et il y a aussi que Louis Bouchard, avec son expérience, est passé maître dans l’art de préparer des plans d’entraînement et de saison pour ses athlètes.
“Le constat que je fais, affirme Jules, c’est que mon peak a bien marché. Je fais mon plan avec Louis. Justin est là quand j’en ai besoin mais Louis est mon coach de référence. En ce moment, je drive sur le travail de l’été dernier.”
De toute évidence, ce travail a été bien planifié et son plan de saison merveilleusement bien exécuté.
Et à seulement 25 ans, il lui en reste tellement sous les skis!
